Faire tomber de nouveau un mur allemand pour sortir l’Europe de l’impasse
pour faire suite Ă la “double impasse” publiĂ©e l’annĂ©e dernière avec Shahin VallĂ©e, notre nouvelle contribution: “Sortir de l’impasse europĂ©enne : pour une nouvelle thĂ©orie du changement“.
Le jugement de la Cour Constitutionnelle allemande sur le programme d’achat de la Banque Centrale EuropĂ©enne du 5 Mai 2020 a fait l’effet d’une bombe. Derrière les dĂ©bats techniques sur la politique monĂ©taire, le dĂ©bat politique qu’il lance est fondamental : l’Union europĂ©enne est-elle une simple association d’États seulement reliĂ©s entre eux par des traitĂ©s de droit international public que chaque cour constitutionnelle nationale peut remettre en question Ă sa guise ? Ou bien est-elle une construction juridique et politique sui generis, dont l’objet est la constitution progressive d’une communautĂ© politique transnationale, d’une dĂ©mocratie fonctionnelle et lĂ©gitime, avec en perspective Ă©ventuelle les fondements d’un État Hobbesien ? C’est cette alternative qui Ă©cartèle les EuropĂ©ens depuis les dĂ©buts de l’aventure, que le Brexit a tranchĂ©e pour le Royaume-Uni en 2016 – et qui se repose aujourd’hui avec acuitĂ© existentielle, alors que la succession de crises fragilise l’édifice. […]
[…] Depuis Albert Hirschman, on considère qu’il existe trois réponses face à la défaillance d’une institution : loyalty, exit et voice. De toute évidence, si la loyauté des autorités nationales n’a pas produit l’effet escompté, la sortie des institutions en revanche ne répondra ni aux défaillances d’origine, ni aux problèmes supplémentaires qu’elle engendrerait. Il ne reste donc que l’interpellation. Mais celle-ci ne pourra se limiter au champ institutionnel et national. Pour sortir l’Europe de l’impasse, il faut de nouveau faire tomber un mur allemand. On ne le fera que par l’européanisation de l’interpellation. Par la politique transnationale.