OGM’-pas trop

OGM’-pas trop

12 May 2025 Off By EG

Alors, OGM ou pas ? Les Nouvelles Techniques GĂ©nomiques sont dans les tubes lĂ©gislatifs europĂ©ens depuis 2023 quand la Commission a proposĂ© une rĂ©glementation pour les encadrer, avec des règles plus souples pour que pour les OGM interdits dans l’UE. Ces NTG, telles que CRISPR/Cas9, permettent de modifier le gĂ©nome des plantes avec une prĂ©cision sans prĂ©cĂ©dent. Mais contrairement aux OGM “classiques”, ces techniques peuvent produire des modifications similaires Ă  celles observĂ©es dans la nature ou par sĂ©lection traditionnelle, comme l’hybridation. Elles offrent un champ d’application très Ă©largi, mais comme le souligne l’ANSES, elles nĂ©cessitent aussi une Ă©valuation des risques au cas par cas, une surveillance post-commercialisation et une prise en compte des enjeux socio-Ă©conomiques. Leur statut juridique reste dĂ©battu. D’oĂą l’importance d’un dĂ©bat dĂ©mocratique pour encadrer ces innovations. 

Sous impulsion de la prĂ©sidence polonaise, le 14 mars 2025, le Conseil de l’Union europĂ©enne adoptait son mandat de nĂ©gociation sur la rĂ©glementation des plantes issues des NTG.  

Ce mandat Ă©tablit deux catĂ©gories de NTG: la catĂ©gorie 1, assimilĂ©e aux plantes conventionnelles, exemptĂ©e des règles OGM mais avec Ă©tiquetage des semences ; la catĂ©gorie 2, soumise Ă  la lĂ©gislation OGM existante. Les États membres peuvent interdire la culture des NTG de catĂ©gorie 2 sur leur territoire et prendre des mesures pour Ă©viter leur prĂ©sence involontaire, notamment dans l’agriculture biologique. Le mandat introduit Ă©galement des obligations de transparence sur les brevets associĂ©s aux NTG de catĂ©gorie 1, via une base de donnĂ©es publique, et prĂ©voit la crĂ©ation d’un groupe d’experts sur les brevets ainsi qu’une Ă©tude d’impact de la Commission. 

Le Parlement avait adoptĂ© la sienne l’annĂ©e dernière, mais avant les Ă©lections. Il proposait d’exempter les NTG de catĂ©gorie 1, proches des plantes conventionnelles, des règles OGM, tout en interdisant leur utilisation en agriculture biologique. Les NTG de catĂ©gorie 2 restent soumises Ă  la lĂ©gislation OGM. Les dĂ©putĂ©s demandent Ă©galement l’interdiction totale des brevets sur les NTG pour Ă©viter des dĂ©pendances pour les agriculteurs.  

Une position du Parlement plutôt favorable, malgré des nuances. Le député Pascal Canfin (FR-Ren) alors président de la commission ENVI y voyait un instrument pour lutter contre la crise agricole et le stress climatique

Les trilogues (négociations entre les positions des institutions) sur le NGT ont donc commencé. Avec plusieurs points d’achoppement. Le site Contexte en fait la liste: équivalence au conventionnel, l’évolution dynamique de la réglementation, la propriété intellectuelle et la brevetabilité, l’étiquetage et l’information aux consommateurs, l’impact sur l’agriculture biologique.

Parmi les enjeux des nĂ©gociations, la brevetabilitĂ© en est un des majeurs, soulignait dĂ©jĂ  Le Monde en 2023. C’est “le sujet problĂ©matique”, rappelle Contexte.  Les risques vont du monopole de grandes entreprises, aux problèmes d’accessibilitĂ© des semences, Ă  la potentielle marchandisation de traits spĂ©cifiques qui se retrouvent dans la nature.  

Sur ce dernier point, le Parlement s’oppose aux reprĂ©sentants des Etats. L’objectif est d’éviter aux derniers petits semenciers europĂ©ens une insoutenable concurrence avec les plus puissants, les exposant Ă  des “poursuites en contrefaçon”. Cette position critiquĂ©e par les Etats qui y voient une façon d’accroĂ®tre la compĂ©titivitĂ© agricole et technologique europĂ©enne. Cette position Ă©quilibrĂ©e du Parlement europĂ©en est aussi critiquĂ©e par les activistes anti-OGM. Ils refusent les NGT dans la continuitĂ© de leur combat, et considèrent la position du Parlement comme trop conciliante.

L’opposition a commencĂ©, avec des actions coup de poing comme en Italie du nord l’annĂ©e dernière, Ă  l’image de celles qui firent la notoriĂ©tĂ© des anti-OGM de l’époque. Au-delĂ  des seules questions philosophiques sur la manipulation du vivant qui engagent les croyances et les reprĂ©sentations, se trouvent au cĹ“ur du dĂ©bat la question de la souverainetĂ© alimentaire et la dĂ©fense d’un modèle Ă©conomique agricole qui ne repose pas que sur la puissance de l’agro-industrie.