Vagues brunes
Les pluies diluviennes qui se sont abattues sur l’Europe centrale et l’Italie, Ă la mi-septembre ont provoquĂ© des inondations massives dans plusieurs pays, notamment la Pologne, la RĂ©publique tchèque, la Slovaquie, l’Autriche et la Roumanie. Les prĂ©cipitations ont atteint des niveaux exceptionnels, dĂ©passant 300 mm en trois jours dans certaines rĂ©gions.
Les consĂ©quences ont Ă©tĂ© spectaculaires et dramatiques : dĂ©bordement de rivières majeures comme l’Oder et la Neisse, rupture de barrages, notamment Ă Nysa et Stronie ŚlÄ…skie en Pologne, infrastructures endommagĂ©es, destructions d’habitats, etc.Â
22 morts sont Ă dĂ©plorer, et des milliers de personnes ont se sont vues contraintes de fuir leur domicile. Avec des dĂ©gâts Ă©valuĂ©s Ă près de 3,3 milliards d’euros, ces inondations sont dĂ©jĂ considĂ©rĂ©es comme l’un des Ă©vĂ©nements climatiques les plus coĂ»teux par Gallagher Re, une sociĂ©tĂ© de rĂ©assurance. Mais ce montant ne couvre qu’une infime partie des dommages rĂ©els. Â
La majeure partie de la facture devra ĂŞtre rĂ©glĂ©e par l’UE et les gouvernements : la RĂ©publique tchèque a confirmĂ© qu’elle utiliserait les fonds de l’Union europĂ©enne tandis que la Pologne a annoncĂ© qu’elle demanderait l’aide financière europĂ©enne et qu’elle activerait Ă©ventuellement le mĂ©canisme d’urgence de l’UE.Â
Mais derrière ces questions financières se posent aussi des questions politiques. Ainsi, pour l’Autriche qui votait le dimanche 29 septembre, les inondations ont modifiĂ© la couverture mĂ©diatique et le rythme de la campagne. Â
En 2002, l’action du chancelier allemand G. Schröder en rĂ©ponse Ă des inondations de mĂŞme ampleur avait considĂ©rablement changĂ© la donne politique et sauvĂ© sa campagne dans des Ă©lections qu’il allait probablement perdre. En 2021, le candidat CDU Armin Laschet avait en revanche perdu toutes ses chances de gagner en Ă©tant filmĂ© hilare pendant un discours du prĂ©sident allemand après la crue Ă©clair catastrophique de l’Aartal, qui avait tuĂ© 188 personnes.Â
D’ailleurs, En Allemagne, alors que le gouvernement agite la carte de l’immigration, certains journaux rappellent que le vrai combat est celui du changement climatique, qui constitue une urgence vitale.Â
Mais pour le FPĂ–, l’extrĂŞme-droite autrichienne, qui a fait la course en tĂŞte des sondages pour cette Ă©lection fĂ©dĂ©rale, ses positions climatosceptiques n’auront finalement pas pesĂ© dans la balance. La victoire sans appel obtenue avec près de 30% des voix repose sur d’autres ressorts que la conscience climatique.
La conscience du risque climatique n’aura pas profitĂ© aux partis plus crĂ©dibles sur le sujet. Car les experts avaient soulignĂ© entre autres que la loi sur la restauration de la nature pourrait contribuer Ă attĂ©nuer ces effets. Or cette loi a failli briser la coalition sortante conservateurs/verts quand la ministre de l’environnement des Verts l’a votĂ©e au Conseil contre l’avis de l’Ă–VP, permettant son adoption au niveau europĂ©en. Â
Les Verts autrichiens n’en ont pas profitĂ© Ă©lectoralement, et il est peu probable qu’ils deviennent un arbitre sĂ©rieux dans la composition du prochain gouvernement. On peut espĂ©rer cependant que cette catastrophe incitera les gouvernements d’Europe centrale Ă soutenir, plutĂ´t que limiter le Green Deal, Ă l’heure oĂą la prĂ©sidence hongroise du Conseil de l’UE Ă©vite le sujet au profit de la compĂ©titivitĂ© et les énergies fossiles, ce que la future prĂ©sidence polonaise semble vouloir continuer, comme l’analyse cet article du Green European Journal.Â