Enlarge your EU

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18 November 2024 Off By EG

Avant que la fièvre Musko-Trumpiste n’accapare toute l’attention de la sphère mĂ©diatique, et que l’offensive russe jusqu’aux frontières extĂ©rieures de la Hongrie et de la Pologne, nous rappelle le danger dans lequel vivent les habitants des territoires aux confins de l’UE, il reste un peu de bande passante pour les deux derniers candidats Ă  l’Union europĂ©enne issus de l’ex-URSS. 

En Géorgie, au lendemain des élections législatives du 26 octobre, l’analyse des résultats et les différentes présences internationales suggéraient des fraudes généralisées, des enquêtes ont donc été réclamées.  L’UE et les Etats-Unis dénoncent de plus le rôle du Kremlin dans ce résultat. Ce dernier dément. La Commission électorale géorgienne, le16 novembre, confirme les résultats finaux : Rêve géorgien récolte 53,9 % des voix. Evidemment, cette conclusion ne prend pas du tout en compte que la législation a été révisée ces derniers mois pour garantir cette victoire. En Abkhazie, région séparatiste prorusse de la Géorgie, de violentes  manifestations disent avoir pour objet d’empêcher la ratification d’un accord permettant aux entreprises russes d’investir sur ce territoire. 

Mais il y a plus déroutant encore: le Premier ministre géorgien Irakli Kobakhidzé, se fécilite de cette juste victoire, avant de promettre que l’intégration européenne reste la principale priorité de Tbilissi. Schizophénie politique, tactique masquée, ou hommage contemporain à la novlangue orwellienne?

Pendant ce temps, en Moldavie la situation peut sembler un peu plus simple mais les résultats des derniers scrutins laissent songeur. La présidente Maia Sandu, élue en 2020, sur sa promesse de modification constitutionnelle, se trouve confrontée à une campagne anti UE et pro-Kremlin menée par Ilan Shor. L’homme du Kremlin dans l’ancienne république soviétique aurait orchestré un système d’achat de votes. 

Il aurait rĂ©ussi Ă  corrompre 300 000 Ă©lecteurs moldaves, soit 12 % des suffrages exprimĂ©s.  Un chatbot Telegram “STOP EU” proposait aux Ă©lecteurs de verser  entre 50 et 100 euros pour un “non” au rĂ©fĂ©rendum relatif Ă  l’adhĂ©sion Ă  l’UE.  RĂ©sultat, seuls 49% des Ă©lecteurs se sont rendus aux urnes pour participer au rĂ©fĂ©rendum et 50,4% d’entre eux ont votĂ© en faveur de l’intĂ©gration europĂ©enne en tant qu’objectif dans la constitution (V. EIH, 28.10.2024). 

En outre, Maïa Sandu, candidate pro-UE dans la course à la présidentielle se trouvait face à Alexandre Stoianoglo, le dimanche 3 novembre 2024. Elle a remporté le scrutin avec 55,3 % des voix, une victoire que l’on peut qualifier de confortable, assortie d’un taux de participation plus élevé qu’au 1e tour. On peut en déduire que la campagne anti-UE concernait essentiellement le référendum et non pas sa tête d’affiche. 

La future commissaire Ă  l’élargissement Marta Kos se trouve donc dans une situation inĂ©dite. Lors de son audition au Parlement europĂ©en du 7 novembre, elle a exposĂ© clairement qu’au regard des prĂ©cĂ©dents gĂ©orgien et moldave, le Kremlin apparaĂ®t dĂ©terminĂ© Ă  nuire Ă  l’Union. Après plus d’une dĂ©cennie Ă  dĂ©nigrer la construction europĂ©enne, ou au mieux Ă  l’ignorer, on se demande pourquoi le pouvoir russe utilise autant de moyens pour ralentir la candidature gĂ©orgienne et la modification constitutionnelle moldave. Depuis plus d’une dĂ©cennie aussi, l’élargissement constitue le “parent pauvre” de la construction, ce qui explique un certain dĂ©sintĂ©rĂŞt. L’élargissement de l’UE est encore très largement – par principe – critiquĂ©. Et la candidature de l’Ukraine ne semble encore vue par beaucoup que comme un des moyens de pression gĂ©opolitique sur la Russie. Les commissaires prĂ©cĂ©dents ne donnaient l’impression de ne voir dans l’élargissement que l’opportunitĂ© de dĂ©velopper les affaires de leur Etat d’origine avec les voisins candidats.

L’UE serait-elle enfin en train de se penser comme une puissance gĂ©opolitique?