FOSSILES
Dans son dernier rapport, l’Agence internationale de lâĂ©nergie prĂ©dit une forte croissance de la demande Ă©lectrique (+âŻââŻ40âŻ% dâici 2035), portĂ©e par lâĂ©lectrification (chauffage, mobilitĂ©, data centers), avec des renouvelables dominants. Cependant, la sĂ©curitĂ© Ă©nergĂ©tique dĂ©pend de la disponibilitĂ© des minerais critiques, comme les terres rares, largement concentrĂ©s dans quelques pays, posant un risque gĂ©opolitique majeur. LâĂ©lectricitĂ© devient centrale, mais les infrastructures (rĂ©seaux, stockage) peinent Ă suivre. Le rapport souligne un retour du nuclĂ©aire, notamment via les petits rĂ©acteurs modulaires.
MalgrĂ© les menaces et les reculs dans lâesprit, la trajectoire de la dĂ©carbonation europĂ©enne ne semble pour le moment pas affectĂ©e par les attaques sur le Green Deal. Le mix Ă©nergĂ©tique europĂ©en reste trĂšs diversifiĂ© mais en forte mutation.
Les Ă©nergies fossiles (gaz, charbon, pĂ©trole) reprĂ©sentent encore une part significative de la consommation finale, mais leur poids diminue au profit des renouvelables, comme le montre le rapport Ember sur lâannĂ©e 2024. LâUE a fortement dĂ©veloppĂ© lâĂ©olien et le solaire, qui couvrent dĂ©sormais une part croissante de la production Ă©lectrique, tandis que lâhydroĂ©lectricitĂ© reste stable.
Le nuclĂ©aire joue un rĂŽle clĂ© dans certains pays (France, Belgique, Hongrie), assurant une production bas-carbone constante. LâefficacitĂ© Ă©nergĂ©tique progresse lentement, et le stockage ainsi que les rĂ©seaux intelligents peinent Ă absorber lâintermittence des renouvelables. La dĂ©pendance aux importations de gaz, notamment russe, reste Ă©videmment un dĂ©fi majeur pour la sĂ©curitĂ© Ă©nergĂ©tique (ES 29/9/25).
Certes, les investissements de lâUE dans les Ă©nergies fossiles diminuent mais ils persistent, comme le montre le rapport de lâEEAâŻ: entre 2015 et 2025, ils ont chutĂ© de 32âŻ%. Pourtant, en 2025, les flux vers le charbon et le gaz repartent Ă la hausse, soulignant la dĂ©pendance durable de lâEurope aux infrastructures fossiles.
Un exemple supplĂ©mentaire des contradictions Ă©nergĂ©tiques dans lesquelles lâUE se retrouve pour des raisons gĂ©opolitiques : rĂ©cemment, la GrĂšce, Chypre et IsraĂ«l ont relancĂ© leur coopĂ©ration Ă©nergĂ©tique stratĂ©gique, soutenue activement par les Ătats-Unis. Via le format â3+1â lors dâun sommet ministĂ©riel en novembre Ă AthĂšnes, les quatre pays se sont engagĂ©s Ă renforcer la sĂ©curitĂ© Ă©nergĂ©tique en MĂ©diterranĂ©e orientale, diversifier les approvisionnements et rĂ©duire la dĂ©pendance visâĂ âvis dâacteurs qualifiĂ©s de âmalsainsâ. Ils soutiennent des projets dâinterconnexion, notamment le corridor Inde-Moyen-Orient-Europe, et Ă©voquent la crĂ©ation dâun âEnergy Centerâ mĂ©diterranĂ©en. Dans ce cadre, la construction dâun gazoduc reliant IsraĂ«l Ă lâEurope via Chypre et la GrĂšce, avec un rĂŽle accru des Ătats-Unis, revient sur la table.
Le renforcement des corridors gaziers israĂ©loâchyprioâgrĂ©coâamĂ©ricains permet Ă lâUE de diversifier ses importations, rĂ©duisant sa dĂ©pendance aux hydrocarbures russes. Cela pourrait limiter lâinfluence stratĂ©gique de Moscou en MĂ©diterranĂ©e orientale et met sous pression ses projets gaziers vers lâEurope.
Mais comme le dit lâexpert JM Jancovici Ă propos dâun rapport du Shift Project sur la «âŻdouble contrainte carboneâŻÂ»âŻ: lâEurope doit dĂ©carboner non seulement pour le climat, mais aussi pour sĂ©curiser ses approvisionnements Ă©nergĂ©tiques. La dĂ©pendance aux importations, en dĂ©clin futur, rend la transition Ă©nergĂ©tique essentielle pour Ă©viter des perturbations Ă©conomiques et sociales.
Le rapport du Shift est clair : seule la dĂ©carbonation fera la souverainetĂ© de lâEurope. Pas les Ă©nergies fossiles.
